Nord et sud (l'histoire de Morrigun)



 Nord et Sud  Morrigun le Dim 10 Juin - 18:21


Morrigun émergeait de son sommeil, les premiers rayons du soleil inondait son visage. Le printemps était magnifique, les petits vents matinaux ramenaient aux narines de Morrigun des odeurs mêlées d’Edelweiss, de chardons et de lin. Morrigun aimait par dessus tout les odeurs animales, l’odeur du cuir et de l’acier. Elle avait joint ses deux mains sous sa tête pour se faire un oreiller. Deux larges mains, peu féminine qui tranchait avec son statut de femme. Ses épaules étaient larges, presque autant que ses hanches qui n’avaient pourtant jamais enfanté. Son visage était maintenant parcouru de petit tressaillement provoqué par le petit courant d’air qui tentait de la réveiller. Sa peau claire parsemée de grains de beauté innombrables contrastait avec celle de ses semblables. Elle ouvrit peu a peu ses yeux munis de grands cils bruns et ses deux iris se contractèrent pour ne dessiner que deux minuscules points noir au milieu de ses iris glaz.

“Déjà!”

Comme à son habitude elle avait dormit auprès de son cheval “Gwunavel” dans la paille.
Ses long cheveux bruns légèrement ondulés et détachés reposaient sur un des paturons de la bête. Elle se releva d’un geste leste et rapide sans prendre appui sur la bête. Elle repoussa ses cheveux en arrière et se cambra pour se détendre de sa courte nuit. Sa tunique de lin rouille, rustique et ample laissait ses avant bras nus. Elle portait aux poignets deux torques d’argent sertis en leurs extrémités d'améthystes polies. Ses avant-bras parsemés, comme son visage, de grains de beautés étaient recouvert d’un petit tapis de poils bruns épars qui ondulaient sous le vent et les contractions musculaires. Ses avant bras étaient puissants pour une femme, à l’image de ses mains qui laissaient présager plus un travail de force que de broderie.

Elle se dirigea vers un baquet d’eau et y plongea sa tête en s’appuyant sur les bords. L’eau était fraiche et claire, elle distingua le fond du baquet fait de châtaignier. Elle aspira une bonne gorgée d’eau et en sortit la tête en projetant ses cheveux en arrière. De sa main droite elle se frotta les dents et fit circuler l’eau de droite à gauche et cracha au sol le contenu de sa bouche puis de sa voix éraillée presque masculine elle lança à Gwunavel:

“Et maintenant, au travail! J’ai une pièce à finir.”

Le cheval blanc s’était mis debout, et broutait le fourrage qui avait servi de literie à sa maitresse. Morrigun avait déjà rejoint son petit atelier. Elle raviva la flamme dans la forge et commença à trier ses fers pour le travail a venir.
Sur un mannequin était posé son “oeuvre”, une broigne de cuir et d’acier dont les pièces ressemblaient à des écailles de dragons. Elle remonta ses cheveux sur le haut de son crâne et glissa un torque de bronze pour les fixer. Elle jeta dans le feu une brassée de charbon et commença a battre le fer en chantonnant.

“Tan! Tan! Dir! Oh! Dir! Tan! Tan! Dir ha tan!
Tann! Tann! Tir! Ha tonn! Tonn! Tann! Tir ha tir ha tann!”

Elle frappait le fer en cadence pour le durcir en acier et le plier à sa volonté.
Le martèlement du fer réveilla les autres membres du village, d’autres avaient d’ailleurs déjà repris leurs activités en même temps que Morrigun. Le vieux derudh avait pris sa faucille pour la cueillette et les chasseurs avaient déjà quitté le village. Les petits bergers montaient eux aussi vers les alpages pour relever leurs camarades, les filles suivaient leurs mères vers les métiers à tisser ou les potagers. Peu de guerriers étaient encore au village, cinq sans compter le brenin: les plus vieux, ils compensaient l’âge par la raison et l’expérience. Morrigun aperçu la femme de son frère se diriger vers le potager avec sa fille Gaela.

“Elle doit bien avoir quinze ans maintenant; que le temps passe vite.”

Morrigun fit un large geste de la main en guise de bonjour et prolongea son chant en battant le fer. 
Le Brenin fit son tour d’inspection matinal du village en compagnie d’un vieux guerrier. Il s'arrêta devant la forge et lança comme à son habitude un petit bonjour à Morrigun.

“Bore Da, GwerchDir” en esquissant un sourire taquin.

“Bore Da, Brenin.” Elle marqua une petite pause et reprit: 

“Brenin, ce n’est pas amusant de se moquer! 
Ca fait dix ans que ça dure maintenant, quand allez vous arrêter de ne me surnommer ainsi?”

Le Brenin se ravisa et changea de sujet.

“Ta pièce... Ton “oeuvre” avance bien, elle est presque terminée!”

Le Brenin caressait la broigne de cuir recouverte d’acier.

“Tu comptes l'offrir à qui? Ou la vendre à qui?”

Morrigun se plongea dans son travail sans répondre.

“A l’élu de ton coeur, Morrigun? Tu nous cacherais quelque chose?”

“Brenin, qui voudrait d’une femme qui n’arrive pas a enfanter?” Les coups de marteau de Morrigun se faisait plus percutant.

“Justement, celui qui te fera enfanter sera le bon!” Le Brenin esquissa un sourire un peu niais.

Morrigun haussa les épaules et reprit son chant en battant le fer.

Le Brenin crispa sa main sur le poignet gauche de Morrigun, la voyant agacé par l’échange:

“Ce temps viendra pour toi, tu n’as que trente printemps. Les enfants aiment tellement t’entendre leur conter nos légendes.”

Le visage de Morrigun se détendit et elle laissa échapper un large sourire au Brenin. Le chef lâcha son étreinte et reprit son tour du village.

La broigne était presque terminée, il lui manquait tout juste deux écailles. Morrigun prépara dans un pilon un peu d’oxyde de fer et de terre rouge. Elle donna forme aux deux écailles et les porta au rouge dans la forge. Elle déversa ensuite le pigment sur les écailles et battit le fer pour faire pénétrer le pigment. Elle trempa ensuite les pièces dans l’eau fraiche des Montagnes Blanches et contempla le résultat sous le soleil plombant du milieu de journée. L’acier avait pris un léger reflet rouge-orangé dégradé. Elle fixa les dernières écailles sur le cuir et passa la broigne sur ses épaules.

“Pfff, c’est lourd!”

Morrigun s'essuya la sueur du front et fit de grands moulinets de ses bras et fléchit en avant.

“Parfait libre de bouger et le poids, finalement on s’y fait vite”.

Elle reposa la broigne sur le mannequin et la contempla. Bientôt je ferai le casque et les jambières pour l’accompagner. Les fileuses et les chasseurs étaient déjà revenu et s’affairaient autour de leurs repas. Morrigun sortit d’une niche, dans la forge, une jatte et glissa deux tranches de lard sur une plaque de fer déposée sur les braises. La viande grésillait en diffusant une odeur de graisse et de sels, elle rajouta une grosse patate fendue en deux dans lequel elle glissa un morceau de gras. Puis en regardant la viande et la patate cuire, elle entama son repas en picorant quelques fruits confis agrémenté d’une bolée d’hydromel. Ses yeux se perdaient parfois sur la vallée et les grandes plaines ou l’hivers ils se réfugiaient pour éviter les neiges et le froid des montagnes. La vie lui semblait paisible, ils suivaient les besoins du troupeau de moutons. Les hommes chassaient ou éloignaient les importuns, les femmes enfantaient et tissaient ou filaient la laine, le tout sous la bienveillance du Brenin et du Derudh.

Dans l’après-midi Morrigun s’attela à dresser des patrons pour le casque avec des reliquats de cuir inutilisable pour la maroquinerie, elle était entrain d’assembler les differentes parties du gabarit du casque quand son frère se présenta sous la bannière de la Main Blanche qui battait dans le vent sous le totem du Sanglier. Youric, ravala sa salive et cracha sur la bannière qui trônait depuis quelques lunes à l’entrée du campement. Youric esquissa un sourire maussade à sa soeur et fila dans la hutte du Brenin. Au bout d’une bonne heure, les deux hommes en ressortirent et le Brenin adressa une accolade a Youric en guise de bienvenue. Il semblait que son bannissement venait de toucher à sa fin. Sa femme et la petite Gaela se jetèrent dans ses bras, tandis que le Brenin fit signe à Morrigun de s’approcher.

“GwerchDir, tu vas accompagné ton frère à Bree. Nade a disparue et je crains le pire pour ses enfants. Tu resteras la-bas le temps qu’il faudra, le temps qu’elle revienne ou qu’on sache ce qui lui est arrivé. Et qui sait tu y trouveras peut être un homme ou sur le chemin du retour” Le Brenin sourit d’un air grave. Ton frère aidera pour les recherches.”

Le Brenin marqua une pause afin d’observer les réactions de Morrigun. Morrigun avait les yeux brillants, les yeux du désespoir de quitter les siens et ceux de la soif de nouveautés.

“Tu devras t’accommoder de certaines choses, les autres peuples ne nous aiment pas. Tant que tu veilleras sur les enfants, il ne t’arriveras rien. Si tu sens que rien n’est fait pour les enfants de Nade, alors tu les ramèneras ici.”

Le Brenin prit d’un vieux coffre une masse de facture rudimentaire ornée des motifs du clan et la présenta à Morrigun.

“Tu sais manier le marteau de ta forge mieux que ton père. Si le danger est là, frappe l’ennemi comme le fer que tu bats et reviens nous!” Le Brenin serra le poing et fit un mouvement circulaire en grimaçant pour illustrer son propos.

“Mais Brenin, je n’ai...”

Le Brenin tourna son regard vers Morrigun et elle se tut.

“Bien, Brenin.” Morrigun inclina la tête en guise de soumission.

“J’irai dans ce pays de Bree et je veillerais sur les enfants de la duvodiad. Et je les ramènerai s’il le faut.”

Le Brenin posa ses mains sur les épaules de Morrigun l’écrasant de sa force. 

“La route sera longue pour t’y rendre avec ton frère, mais encore plus si tu dois revenir avec les enfants et ton frère ne pourra sans doute pas être à tes cotés. Ceux de notre sang que tu croiseras ne seront sans doute pas alliés à notre ami, le Magicien Blanc. Ils ne comprendront pas, ne cherche pas a les convaincre, tu dois uniquement te préoccuper des enfants.”

Morrigun acquiesça.

“En attendant nous allons fêter le retour de ton frère lors de la veillée.”

Le Brenin lança les préparatifs de la veillée. Quelques jours après Morrigun et Youric prenaient la route vers le nord, le premier véritable voyage de Morrigun en dehors de son pays.

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 Retour au Sud Morrigun le Mar 19 Juin - 14:03

Morrigun avait passé quelques jours a Bree pour savoir ce qu’il était advenu de Nade: la duvodiad. Ses enfants étaient toujours sous la surveillance de la nourrice. La miraculeuse disparition de la maladie avait relâché un peu sa surveillance et elle les autorisait à sortir dans le jardin pour jouer. Les petits demandaient en permanence des nouvelles de leur mère. La nourrice ne savait que dire.

Morrigun avait bien pris quelques contacts sur Bree mais le Brenin ne lui avait pas dit qu’elle serait dans un monde barbare! L’oisiveté, l'égoïsme, la suffisance et l'appât du gain étaient sans doute nés a Bree. Jamais elle n’avait côtoyé autant de haine et d’indifférence à l'égard d’autrui. Ne sachant ou aller et pour s’immerger un peu plus en Bree, son frère lui avait conseillé de prendre une chambre au Poney Fringuant; puis il avait filé en suivant la piste Angmarin vers l’est.

Dès le premier soir, le tenancier de la taverne avait essayé de l’arnaquer en lui prenant l’intégralité de ses tartans en échange d’une chambre. Le Brenin avait bien stipulé a Morrigun de ne pas faire de vague et de ne pas attirer l’attention sur elle. Heureusement, un de ces oisifs permanents en Bree qui jouait de l'instrument a cordes que l’on appelle luth, vint lui prêter main forte sans demander rien en échange. Au contraire celui-ci lui donna même son luth, la voyant fasciné par l’instrument. Il lui demanda ce qu’elle venait faire a Bree. La réponse de Morrigun le surprit, ne comprenant que l’on puisse faire autant de chemin pour veiller sur deux enfants. 

La taverne était un lieu permanent de dispute et de tension, Morrigun entendait parler de Peuples Libres et de leur front commun face au Grand Oeil et se demandait ce que valait réellement cette entente. Elle avait découvert et vu pour la première fois des corrachs, bugans et begclusts. Les plus accueillant étaient sans aucun doute les hobbits comme ils s’appellent eux même à Bree. Morrigun étaient toujours surprise de les voir quasi tout le temps a table ou avec des victuailles en main. Les nains étaient peu sociables, bougons et fiers, ils avaient qui plus est une sacrée descente et un appétit non dissimulé pour les boissons alcoolisées. Les elfes, Morrigun en avait vu très peu. Et le peu, hautains et toujours un luth en main.

Mais ce qui la chagrina bien plus c’est cette atmosphère oppressante, ou chaque mot peu être le début d’un conflit. Malgré ses engagements, Morrigun avait fait son choix. Rien ne la retenait plus ici, si compté qu’elle voulait y rester un peu. Son regard se porta loin vers le sud. Calla lui avait montré la direction de la Comté, sans doute agréable au milieu des Bugans, mais sa route la ramènerai vers les Montagnes Blanches.

Morrigun solda son dû au duhirun Prosper, et enfourcha Gwunavel. Rixe, tension entre la garde et les habitants s'effaçaient de sa mémoire. Pas une seule fois elle avait entendu parler de la duvodiad. Elle était pourtant conseillère et officiait à l’Os Pisse. Les barbares! Même un petit berger mort a plus d’égard dans le clan qu’une conseillère à Bree! Morrigun passa devant l’Os Pisse que l’on déménageait, le dernier médecin distribuait les meubles et les draps aux plus démunis, c’était une begclust vêtue d’azur qui en permanence regardait vers l’ouest avec un serrement au coeur. La maison de la duvodiad était sur les hauteurs du quartier Outrèche, on ne pouvait la rater! Devant la maison un garde trônait en permanence et sur le coté droit du perron une bannière de la Main Blanche battait mollement dans la brise légère. Morrigun avait été surprise de voir une bannière en ce lieu. Mais le Brenin avait prévenu Gwerc’h Dir que Nade n’était pas comme les autres. Elle avait toujours craché sur ce qui était convenu et policé et avait plusieurs fois flirté avec la mort de part ses actions. Dans le grand jardin, deux chevaux broutaient paisibles. L’un, pie était une pouliche avec sur sa croupe les cicatrices d’une rencontre avec une Warg. L’autre, un étalon, à n’en pas douter par l’excellente forme qu’il affichait à ce moment là, était gris comme la cendre et, malgré les pluies, on distinguait encore quelques traces de marques rituelles du Pays de Dun. Sans doute le cheval de la duvodiad et celui du garde ou de la nourrice. Morrigun avait pourtant surveillé la maison plusieurs fois mais elle n’avait jamais vu quelqu’un prendre une de ces deux bêtes.

Gwerc’h Dir sauta sur le sol, et laissa sa bête divaguer dans le jardin. Elle se dirigea vers la porte et épousseta un peu son tartan. Morrigun serra le poing et frappa à la porte. La nourrice lui ouvrit et la regarda, cherchant a reconnaitre le visage sous la capuche.

“Bore da, dunes”

La voix éraillée s’enfila par la porte dans la pièce principale de la maison et vint chatouiller les oreilles des deux bambins, qui tournèrent la tête vers l’entrée se détournant de leurs jeux. Le visage de la nourrice se ferma, et elle laissa perler une larme. Puis dans un murmure elle demanda a Morrigun:

“Vous venez pour les enfants, Nade est morte?”

Gwerc’h Dir ôta sa capuche, laissant sa cascade de cheveux bruns ondulés tomber sur ses épaules; puis levant ses yeux glaz vers la nourrice laissa échapper:

“Ie, moi craindre elle jamais revenir. Elle vouloir enfants vivre dans endroit préservé.
Ici, Bree pas bon pour enfants: guerre, haine, égoïsme et indifférence!”

La nourrice ouvrit la bouche et se figea:

“Et les parrains et marraines?”

Cyrion s’avança du haut de ses trois ans:

“Os gweuch un da, maur chuaer.”

Morrigun sourit et s’agenouilla devant le petit blond au teint mat. La nourrice passa sa main dans les cheveux de Cyrion. Cyrion regarda Morrigun et lui demanda:

“Quand maman reviendra?”

Dievlig s’approcha et se réfugia derrière son frère qui la dépassait d’une tête. Morrigun répondit en dunael:

“Je ne sais pas, petit homme. Peut être ne reviendra t’elle jamais auprès de vous. Je suis ici pour vous emmener dans le pays qu’elle voulait rejoindre pour vous. Si votre mère revient un jour elle vous y retrouvera.”

“Et papa, il viendra aussi avec nous?”

“Votre père pourra venir quand bon lui semble. Mon frère lui laissera un message à la taverne du voleur que l’on nomme Prosper”

La nourrice serra ses deux mains sur les épaules des deux bambins, sachant que ses heures auprès d’eux étaient comptées. La nourrice fit rentrer les enfants dans la maison, et invita Morrigun a en faire de même. Morrigun posa son regard sur chaque meuble de la pièce et sur les cartes et tableau aux murs. Rien de clinquant, des meubles simples et fonctionnels, en dehors des murs ouvragés la maison était certes grande mais fonctionnelle. Dans un coin de la salle principale, Morrigun distingua deux selles d’occasions faite pour des enfants. Nade avait fait deux grandes couvertures avec le restant des tartans pour les enfants. Les enfants jouaient avec une ribambelle de petits sujets de bois représentant des animaux. Dans un coin de la pièce trainaient un biniou, un bodhran et un vieux luth ouvragé couvert de sang et dont la table entaillée par une griffe avait été réparé. Le bureau était encombré de cartes sur lesquelles figurait le tracé d’un itinéraire menant vers les Montagnes Blanches. Morrigun se saisit d’une liasse de parchemin et regarda les feuillets sans rien comprendre, sur certains figuraient des dessins d’animaux ou d’outils avec deux mots calligraphiés. Morrigun glissa les feuillets dans une besace ainsi que quelques mines de plomb et retourna voir les enfants.

Morrigun donna quelques consignes à la nourrice et lui demanda de préparer le nécessaire pour les enfants: nourriture et change pour un long voyage. Puis sortant de la maison elle s’affaira a préparer les montures pour un départ le lendemain matin. Morrigun fit promettre ensuite a la nourrice de tenir la maison au cas ou le père des enfants passerai sur Bree, et de veiller a ce que rien ne disparaisse dans l’immédiat. Les enfants glissèrent dans un sac leurs sujets de bois et se dirigèrent vers le luth. Dievlig caressa le bois taché du luth et dit a Morrigun:

“Mam aime le luth. On peut le prendre?”

Morrigun prit le luth et le glissa dans un sac de jute. Elle déposa le luth que lui avait donné l’inconnu et grava de son couteau un sanglier sur la table près du chevalet. Morrigun expliqua aux enfants d’ou elle venait et pourquoi elle les emmenait ailleurs. Les enfants étaient vifs et éveillés, sans doute la gémellité. Ils maniaient presque naturellement les deux langues, westron et dunael avec un petit accent sans doute lié à leur mère. Cyrion avait déjà une belle assurance et une poigne pour son très jeune âge. Dievlig était ailleurs, réservée sans doute, et un regard qui vous transperce et vous met a nu. Tous deux avaient la peu mate des dunlending les plus clairs mais leurs cheveux de paille et de feu trahissaient une part de leur hérédité. Morrigun essaya de gagner la confiance des deux enfants par ses histoires et le jeu, son expérience avec les enfants de son clan fit le reste.

“Maintenant les enfants, il va falloir vous reposer car nous avons un long voyage a faire.”

 Bree à Tharbad  Morrigun le Dim 8 Juil - 11:25

Un beau soleil d’été accompagnait le départ de Morrigun et des enfants. A leur âge, ils auront vite oublié Bree et ses tensions. Morrigun avait installé Cyrion sur Ys, l’étalon gris de Nade et Dievlig sur la pouliche pie: Varicelle. Gwunavel et les deux chevaux de Nade avaient chacun deux grandes sacoches de selle remplies de victuailles. Une grande toile de jute huilée était roulée derrière la selle de Morrigun pour se prémunir des orages d’été. Le chemin allait être long, car les très jeunes cavaliers n’avaient pas encore de formation équestre. Les selles récupérées par Nade leur permettaient d’être en parfaite sécurité sur les deux montures, en tout cas pour l’allure tranquille du pas ou du petit trot.

La route allait être simple dans un premier temps, le Chemin Vert était encore une route relativement sure. Si Morrigun avait des doutes ou sentait un risque elle faisait volontiers un crochet en longeant la route a bonne distance. Cette contrée “civilisée” était un jeu d’enfant pour des montagnards habitués a des climats et des contraintes bien plus rudes. Morrigun savait le chemin risqué jusqu’au Dunland mais si la duvodiad le prévoyait, alors pour elle il n’était pas impossible. Morrigun avait pris les cartes chez Nade car les dessins étaient bien plus précis que la carte que lui avait dressé son frère à la hâte.

Varicelle, la bonne pouliche promenait Dievlig en limitant le cahot de la route parfois fortement dégradée. La bête semblait si calme avec la petite sur le dos. Ys et Cyrion faisait des écarts en permanence, le petit bonhomme découvrait avec délice et sans le savoir les rudiments de l’équitation. Par moment Ys, montrait qui est le patron au petit morveux cramponné sur son dos en donnant un bon coup sur la bride. Cyrion criait fort alors en levant les bras au ciel et en regardant les oreilles de la bête:

“Duhirun!”

Morrigun enroulait les mouvements de Gwunavel de ses hanches, la capuche de sa lourde cape de peau lui masquait le haut du visage en battant sur son front. Sa peau mate et ses cheveux de jais, ses traits sans équivoques d’une dunes pure souche détournait les regards des “braves gens”. Elle avait pris la mauvaise habitude de la garder chez les duvodiad, ne la rabattant qu’en présence de plusieurs personnes. Morrigun avait la naïveté de penser que dans ce monde, il y aurai toujours une bonne âme charitable pour venir l’aider.

Les immenses paysages se déroulaient lentement, au pas. Parfois quand la vue était particulièrement dégagée, Morrigun ou un des enfants chantaient une comptine Dun, ou bien encore Morrigun parlait du pays de ses ancêtres, de sa vie paisible au sein du clan. Les enfants l’harassaient de questions sans la moindre retenue. Morrigun voyait en ces enfants la pureté des hommes, non vérolés par l’envie, la jalousie, l’hypocrisie que leurs sociétés avaient établis et placés sur un piédestal. Certes elle avait vu quelques individus dignes de confiance a Bree, mais le bouillon immonde finirait par les rattraper. Certes son Pays est dur, mais il a au moins le mérite de recentrer l’Homme sur ses besoins réels. 

Les jours défilaient paisibles, l’un après l’autre. Les enfants se rapprochaient de Morrigun, malgré le sentiment étrange qui les habitaient. Morrigun savait que les enfants ne seraient jamais les siens et les enfants savaient, sans pouvoir l’exprimer, que Morrigun ne serait jamais leur mère. La seule référence biologique, galopait sans doute dans les plaines du Rohan. Nade aurait sans doute espéré que leur couple forme le premier pas vers le rapprochement de ces deux peuples que tout avait opposé. Nade n’aurait sans doute jamais supporté la dérive des hommes de Bree et des étrangers qui cherchaient à mettre la main basse sur la ville. Les Breeards ont toujours été indépendants, comme les Dunlending des clans les plus traditionalistes.

Morrigun glissait son regard sur la piste ou le Chemin Vert. Son habitude de la traque du gibier de montagne, lui laissait entrevoir par moment le passage d’un cavalier en avant d’eux; cependant malgré ses efforts elle n’avait pas encore réussit a distinguer celui ci. La trace était relativement fraiche et n'était guerre qu’a une journée d’avance. 

Youric avait dressé un plan incluant Tharbad comme arrêt obligatoire sur la route vers le Dunland. Morrigun avait comparé les cartes durant le trajet et malgré son analphabétisme avait su rapproché les cartes sur la sienne. Au loin elle apercevait les fumées crasseuses de Tharbad, repaire de brigands de tous poils. Youric lui avait donné l’endroit d’un clan d’algraig du Dunland qui comme lui avait refusé de prêter allégeance a la Main Blanche. La seule différence résidait dans leur soif de richesse et leur absence totale de compassion en dehors des leurs.

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 Tharbad  Morrigun le Mar 24 Juil - 13:59

Tharbad, l’étape obligatoire, la bonne occasion de faire un peu de ravitaillement pour Morrigun et reposer les enfants du trajet accompli. La ville n’était plus que l’ombre d’elle même depuis bien longtemps sans doute. Entre les toits éventrés, les campements de brigands et les quelques citadins, l’atmosphère y était bien plus pesante et glauque qu’a Bree. Morrigun en aurait presque regretté les pitoyables pantins de Bree et les vantards qui bombaient le torse chez ce vieux voleur de Prosper.

Morrigun établit le campement dans un coin de la ville relativement calme et plus propice aux gens de sa race comme lui avait indiqué son frère. Elle gardait en permanence la grosse masse orque retravaillée que lui avait donné le Brenin. La lourde masse lui battait le bas de la cuisse gauche et avait fini par lui faire un beau bleu près du genou. Les enfants s’affairaient avec leurs jouets de bois et mimaient leurs aventures à cheval. Morrigun s’attachait a ces enfants bien plus qu’elle n’aurait voulu. Elle ne savait faire autrement, elle; Gwerc’h dir; sans doute n’en aurait elle jamais de son propre sang. Morrigun dressa le campement rapidement, profitant du passage régulier des pillards dunlendings sur Tharbad et de leurs restes d’abris. La fin de journée fut passée a jouer avec les enfants sous le regard d’hommes et de femmes dont Morrigun ne savait que penser. La nuit allait être presque luxueuse dans ce havre de tranquillité relatif: Morrigun n’aurait pas a veiller; les animaux ne roderaient pas prêt du campement. Quand aux hommes, ils avaient vite jaugé la fortune des voyageurs et ne faisait qu’épier de temps à autre. 

Morrigun coucha les enfants tôt, leur chantant des berceuses dunaelles de sa voix éraillée. Elle prit ensuite le luth de Nade pour s’essayer dessus, grattant les cordes à vide pour mémoriser les notes. Puis elle s’essaya à jouer de la main gauche en laissant vibrer la note comme le faisaient certains luthistes. Elle passa quelques dizaines de minutes à s’exercer puis reposa l’instrument dans son sac de toile de jute. Dievlig et Cyrion dormaient a poings fermés. Elle glissa sur les deux enfants une couverture de laine serrée et se glissa sous la sienne en enserrant de ses mains les deux petits. Ses yeux fixaient les visages des deux enfants, une larme perla au coin de son oeil et elle se mit à battre des cils pour la chasser.

“Gwerc’h dir! Os gweuch un da, Mam Daear” Morrigun susurrait ses mots mais sa voix portait.

“Ce n’est pas de son ressort, bach chuaer. Seul celui qui nous a damné peut lever ce mal!”

Morrigun leva sa tête vers la voix qu’elle avait reconnu aux premières syllabes.

Youric sauta lestement du petit mur sur lequel il s’était perché pour veiller sur sa soeur et les deux enfants.

Morrigun soupira en reposant sa tête sur son oreiller de fortune.

“Tu les as eux, et tous les enfants du village. Il faut te faire une rai...” Youric stoppa net et passa sa main sur la joue de sa soeur.

“Peut être que l’homme qui te fera mère n’est pas au Dunland, Morrigun... Présentes les enfants au Brenin et reviens ensuite à Bree avec les enfants. Ils ont des...” Youric chercha les mots qu’on lui avait appris.

Morrigun le stoppa dans sa réflexion, toute fière d’avoir retenu ces mots. “Les marraines: Rolan et Isaline.” Morrigun enchaîna ensuite en dunael:
“Rolan n’a pas de femme mais il est bon et attentionné. Isaline a un homme, un guerrier: Ferdents. Mais Bree est toujours agitée, ce n’est pas calme pour des enfants!” 

Youric esquissa un sourire en entendant le massacre que sa soeur faisait à chaque fois qu’elle prononçait des mots en westron.

“Morrigun, ils sont nés à Bree. Même si Nade voulait nous rejoindre, ses enfants doivent avoir le choix. Tu as eut peur à Bree, je te comprends:. Tu es partie, mais tu dois aussi comprendre ce qu’a fait Nade avec les parrains et marraines. Présentes les enfants au Brenin, et reprends la route vers Bree avec les enfants. Les parrains et marraines feront le nécessaire pour les enfants.”

“Je comprends, mais si la duvodiad voulait que ses enfants aillent dans le clan pourquoi devrait je les ramener?”

Youric posa son regard sur le visage de Morrigun. L’inquiétude se lisait sur chacune des petites ridules de la dunaelle trentenaire.

“Parce que tu sais que le monde change et que tu sais qu’ils vivront dans un monde différent du notre. Savoir d’ou ils viennent est important, mais avec les Erudits et les parrains et marraines ils auront d’autres horizons aussi.” L’homme des bois serra sa main sur l’épaule de Morrigun en signe de réconfort. Il était évident qu’elle s’était attachée aux enfants plus que de raison; la fuite avec eux n’avait qu’aggravé les choses.

Morrigun ne réagissait pas au geste d’affection de son frère. Elle plongea son regard sur les deux petites têtes blondes et demanda à son frère:

“Tu nous veilles? Je suis fatiguée, je doit récupérer un peu avant de repartir”

Youric bourra une pipe d’herbe de la comté et en allumant celle-ci, répondit par l’affirmative.

Les jours suivants furent paisibles à Tharbad, avant de reprendre la route vers le Dunland. Youric essaya de cerner les intentions de sa soeur vis a vis des enfants mais elle éludait la question.Morrigun semblait indécise, balayée par les vents remontant de ses terres et celle ou son frère lui conseillait de rester.

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 Duvodiad, une dunes à Bree  Morrigun le Ven 3 Aoû - 10:29


La maison de la duvodiad avait bien changée au retour de Morrigun et des enfants. Seul le mat qui portait la bannière de la main blanche avant leur départ restait. La cour de la maison avait été agrémentée de gigantesques totems animaliers figurant les clans du Dunland. L’intérieur de la maison avait été refait et re-décoré de façon plus sobre et intimiste: quelques trophées de chasse et le mobilier nécessaire sans la moindre fioritures. Certaines cartes avaient disparu des murs. La seule pièce presque encore intacte était la chambre de Nade, ses meubles et ses tableaux y étaient restés, ainsi que les coffres.

Morrigun, dessella les chevaux et laissa Cyrion et Dievlig refaire leurs marques dans la maison. A Galtrev, Morrigun avait croisé Engelwyne et Karakbeer le brenin des Erudits d’Arda. Engelwyne, la rohiril avait rendu son éclat à la lame de Nade et avait promis a Morrigun de la donner à un des héritiers de la duvodiad.

Karakbeer quand a lui avait promis de s’occuper des enfants de Nade et de pourvoir a leur éducation avec les parrains et marraines. Ces mots avaient blessé la dunaelle, même si elle savait que le brenin corrach avait raison. Elle avait poursuivit sa route de Bree au village en ayant les mots de son frère, de Karakbeer et d’Engelwyne en tête. Morrigun s’était fourvoyée en s’accaparant des enfants qui n’étaient pas les siens. Le désir et le manque d’enfants avaient été plus fort. Cette épreuve avait eut en elle comme un pouvoir de révélation sur ce qui se cache de plus profond et de mauvais en chacun de nous: le pouvoir et l’envie. 
Jamais elle n’aurait réussi, seule, à élever les deux enfants. Comment aurait elle pu justifier un tel acte quand les enfants lui auraient demandé des comptes. Morrigun ne pouvait se substituer a leur mère. Finalement le retour a Bree faisait son chemin dans l’esprit de la dunaelle, le chemin qui la ramenait vers le dunland la comblait à chaque minute, et ce chemin était source de découverte pour les enfants et certes de dangers. Les semaines passèrent et village des Montagnes Blanches fut atteint. 

L’agitation et des préparatifs de fêtes se faisaient sentir dans tout le Dunland, l’été était propice aux grandes cérémonies: mariages, culte de Mam Daear, et les artisans honoraient Gobha de leurs oeuvres lors d’échanges et de ventes. Morrigun savait que pour le Derudh et le Brenin, ces fêtes seraient aussi l’occasion d’intégrer et de reconnaitre les enfants de la duvodiad dans le clan comme elle l’avait souhaité. 
Des groupes de duns parcourraient leurs terres avec leurs troupeaux pour les grandes foires estivales, parfois des jeux étaient organisés lors de ces foires: sculptures de totems, lancer de billots et les nuits étaient souvent passées a danser au son des instruments des musiciens du pays de Dun: Jon Bonne-âme percussionniste prolixe, Kiss Moue-Ne l’adulé joueur de bodhran de Methedras, Manu Caché le tambour espiègle de Galtrev, Carl Eau de Nulniais le sonneur de Lhanoch et Alan Ci-veille le harpiste du Dwimorberg. Il faudrait au moins cela à Morrigun pour oser reprendre la route vers Bree et laisser ses racines derrière elle. Chaque journée au Dunland, chaque nuit était vécue à deux cent pour cent par la dunaelle, comme une orgie avant de faire abstinence, comme une grande-bouffe avant une diète. 
Dans un moment de calme, elle se rendit sur le cairn de son premier époux. La pierre levée était toujours là dix ans après, le temps n’avait pas effacé les gravures sur la roche dure. Les herbes folles chatouillaient le pieds de la pierre dans un bruissement a peine audible. L’ombre de la pierre dessinait sur le sol un mince croissant accolé à la pierre sous le soleil a son zénith. Les cheveux de Morrigun battaient son visage comme le bord échevelé d’un oriflamme. Les petites mèches procuraient une douce caresse à ses joues tannées par le voyage et le soleil d’été. Sans une larme, les yeux humides elle contempla l’horizon longtemps devant la pierre levée se remémorant les caresses et les baisers, mais le temps les avait remplacé par le frisson de la petite bise sous sa tunique de lin. Morrigun aurait tant espéré le revoir ne serait ce qu’une fois comme dans les récits du Dwimorberg, mais jamais elle n’avait vu le spectre de son époux; sentir une dernière fois sa main sur sa joue ou sur son épaule, même si le contact en fut de glace. Rien, le temps avait balayé les souvenirs les plus futiles, les péripéties de la vie quotidienne, il ne lui restait plus que les plus terribles et les plus beaux souvenirs et son visage que le temps n'effaçait que très lentement.

“Drug rhufer! fu nghariad, Gorfwus meun hed.
Mae Corniog i chi wulio hud diwed amser!”

Un coup de vent balaya les cheveux de Morrigun en avant dégageant son cou qui se raidit sous l’emprise glacée de la bourrasque sur sa peau à nue. Elle se retourna machinalement faisant face au vent, mais rien que les collines du Dunland ne se dessinaient devant ses yeux.


Après quelques semaines dans le clan le Derudh et le Brenin reconnurent les enfants de la duvodiad comme faisant partie du clan de façon honoraire. Dievlig fut surnommée Rhud wiwer par les enfants du village et Cyrion, Cun Melun. Après quelques semaines supplémentaires, ils auraient presque parlé dunael comme les enfants nés au Dunland, mais il fut temps pour Morrigun de repartir vers Bree avant l’automne et les premières pluies qui rendaient le pistage plus facile.

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 Sale temps pour une dunes  Morrigun le Lun 13 Aoû - 20:29


Morrigun faisait tourner en permanence l’anneau de Dun Daim autour de son doigt. Tant de jours s’étaient écoulés depuis leurs derniers pas de danse. Dievlig et Cyrion l’avaient gratifié d’une maladie commune mais qui nécessitait une surveillance de chaque instant en ces périodes de grosses chaleurs. Ses journées passaient donc loin de Bree à Outrèche à surveiller les deux enfants de la duvodiad. Morrigun en profitait pour apprendre un peu plus le westron, elle confondait toujours certains mots, conjuguait parfois de façon peu orthodoxe, mais au final elle arrivait a se faire comprendre des breeards. Morrigun ne pouvait guère cacher ses origines, et ne le voulait pas non plus: la croyance de Donoran, un elfe à moitié, qui pensait que tous les Daen étaient mort l’avait bien fait sourire. Elle qui n’avait jamais vu un elfe aurait bien pu lui dire la même chose.

Morrigun avait fini par sombrer un peu dans la mollesse, elle avait perdu un peu de sa poigne en délaissant la forge en vivant à Bree. Ce qu’elle avait perdu en forge, elle l’avait gagné en ouverture sur les autres. De son appréhension et de sa méfiance initiale, il ne restait presque plus rien. Elle avait encore du mal a appréhender la pudeur des “gens civilisés” de Bree, leurs moeurs barbares vis a vis des femmes et leur étonnement à ce qui lui semblait si naturel. Ces gens avaient perdu tout contact avec le réel et la nature; ils en étaient si éloigné que comprendre un druedain aurait été impossible pour eux. Morrigun aura attendu trente ans pour qu’un “homme” porte la main sur elle: même ses anciens époux n’avaient guère eut cette bassesse d’esprit et d’acte envers elle. Dun Daim avait été comme a son habitude magnifique en défendant la pauvre jeune femme et Morrigun. Même une bête, même le pire charognard ne violente pas sa femelle qui se refuse à lui; ici à Bree: oui! Morrigun avait bien tenté de voir le vermisseau qui trônait dans la culotte du goujat, mais sans succès! La chose devait être inversement proportionnelle à l’égo de l’individu.

Dun Daim était une perle, comme un savoir des Daen Coentis oublié, une étoile dans la nuit. Sa présence attisait le coeur de la dunaelle comme un charbon de bonne qualité dans la forge. Morrigun connaissait que trop bien le poids d’un serment et de son bris pour ne pas trop tenter fu nghariad… Mais parfois le désir parcourrait sa peau comme une onde, redressant le duvet de ses avant-bras et lui donnait la chair de poule: l’envie lui commandait un baiser rapide comme elle savait les faire maintenant loin des regards, ces secondes, qui valaient des siècles remplissaient ses journées de bonheur et le ciel aurait bien pu lui tomber sur la tête qu’elle en serait morte le sourire aux lèvres.

Morrigun comprenait Rolan, maintenant, quand il contemplait la lune en voyant le visage de son aimée. Morrigun voyait aussi Dun Daim dans ses moments de vague à l’âme; souvent elle le voyait comme un père attentionné quand elle s’occupait des enfants de la duvodiad. Elle s’imaginait parfois dans une petite fermette au milieu des moutons avec ses propres enfants et fu tuwusog veillant sur eux. Des rêves simples qui souvent font rire, mais qui pour Morrigun n’avait pas de prix.

L'abécédaire de Maerendor portait ses fruits, petit à petit la dunes du clan tûrch maitrisait la lecture et il faudrait sans doute quelques temps avant que, guidée par la main de Dun Daim elle ne puisse coucher ses premiers mots. La maison de la duvodiad était remplie de parchemin et de vieux livres moisis, de notes éparses, comme cette chanson écrite de la main de la duvodiad qu’elle avait mis une journée a déchiffrer. Quand à la bibliothèque des Erudits, il lui faudra sans doute des mois pour en comprendre les premiers ouvrages en westron.

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 Tân  Morrigun le Mar 28 Aoû - 16:01


Morrigun avait laissé Dun Daim et Benaran au Poney Fringuant. La séparation avec Fu Tuwusog avait été encore plus déchirante que les jours passés, comme si progressivement, la dunaelle ne pouvait plus se passer de sa présence. 
Morrigun sentait une griffe autour de son coeur, comme si le serment de Dun Daim était un frein. Morrigun avait tellement peur aussi de le décevoir, chaque minute, chaque heure les rapprochaient un peu plus de la vie à deux; et pourtant elle doutait de cette union. Combien d’hommes l’avaient répudié de part le passé: un, deux, trois... 
Quatre! 
Son premier mari avait eut la malchance de mourir bien avant de la faire, mais l’aurait il fait?
Morrigun voyait en Dun Daim, l’image de son premier mari; pas le physique bien évidemment mais l’âme noble de son premier époux. Le coeur de Morrigun avait tellement été soufflé et refroidi de par le passé que cette fois ci, il brulait de lui même. Tel un phénix, il se consumait jusqu'à la cendre à chaque séparation pour repartir tel un brasier au moindre regard de Dun Daim. Elle en arrivait même maintenant à fuir ce regard, pour ne pas sentir monter en elle cette chaleur et ce désir ardent qui la brulait. Chaque contact, aussi fugace soit il, était comme un tison ardent porté sur sa peau.

Bordé de ses fantasmes les plus brulant Morrigun rejoignit la maison de la duvodiad ou l’attendaient, endormis les deux enfants dont elle assurait la garde. Elle se dirigea dans la chambre et s’allongea sur le lit, sombrant comme une masse dans le sommeil, dans sa grande cape de lin huilée.

Le soleil perçait à travers les volets de bois de la maison, les rires des enfants tirèrent Morrigun de ses rêves et du sommeil. Cyrion courrait après Dievlig en sautant sur le lit et en faisant le tour, criant tous les deux.

“Rwun du garu di, fu Nghariad... Rwun du garu di, fu tuwusog...”

“Gi melin, Gi melin!”

La jolie cape blanche portait sur ses bords les empreintes de pieds des garnements.

Morrigun se releva en attrapant Cun Melun par les pieds.

“Duhiraen! Ni allaf cusgu?!” (Voyou, Je ne peux plus dormir?!)

Morrigun se leva en tenant Cyrion par les pieds, qui se débattait comme un beau diable. Dievlig continuait de singer Morrigun, en prenant des poses de femme conquise ou bouleversée. Puis d’un seul coup elle s’allongea sur le sol de façon théâtrale en criant.

“O mon prince, votre amour me tue!”

Morrigun leva les yeux au ciel en reposant Cyrion sur le lit.

“Deuch umlaen, buduch wedi ennill!
Deuch i gumrud hug un fu mreichiau.” 

(Allez, vous avez gagné!
Venez donc faire un câlin dans mes bras.)

Les deux enfants lui sautèrent dans les bras la renversant dans le lit en riant. La moquerie continua quelques instant en lui cachant le visage de ses cheveux, et en répétant les déclaration en dunael dans ses oreilles.

“Ou avez vous tendu cela?”

Dievlig se mit à sourire et corrigea Morrigun.

“Ou avez vous entendu cela?...
Maur chuaer, tout Bree doit être au courant... 
Les clients du Poney sont très bavards.

Une Dunlending avec un rôdeur dunedain, forcement ça fait parler.”

Morrigun esquissa un large sourire

“Un allgraig ac un leidr furnig gan ein bod un gweld guda dun â gwaed Númenor.”

(Une paria d'un peuple sauvage et voleur, comme nous sommes perçus, avec un homme portant le sang de Numénor.)

“Ce n’est pas si simple cette histoire, les enfants... 

Dun Daim n’est pas un homme libre comme l’eau. Et j’ai tellement de doute sur le fait de le rendre heureux. Peut être que j’en demande trop par rapport à ce que j’ai déjà... Sans doute.”

Morrigun se leva avec les enfants à sa suite, et prépara la collation pour la matinée pour elle et les enfants. Tous les matins ils se rendaient au marché, au puits et passaient une bonne partie de la matinée a cueillir des baies et des fruits dans les alentours. Morrigun avait appris a reconnaitre les fruits et les espèces comestibles de la région et enseignait ce savoir basique aux enfants. Les camelots de Bree commençaient à la connaitre un peu, son accent rude et ses manières avaient fini par être tolérés, ainsi que sa tendance aux interminables négociations sur les prix des denrées et objets dont elle avait besoin.

L’après-midi, Morrigun profitait de l’absence des enfants, pour, comme eux étudier le westron et s’entrainer à la lecture. Morrigun avait commencé à écrire avec les mines de plomb, l’écriture n’étant vraiment pas dans sa nature, elle traversait parfois le parchemin par trop de générosité dans ses gestes, surtout depuis son passage à la plume et l’encre. Ses caractères étaient de taille variable, même dans le même mot; elle trouvait ça plus joli qu’une écriture régulière: enfin elle justifiait son inexpérience et son manque d’assiduité à l’écriture par ce justificatif. Il n’était pas rare de voir ses mains couvertes de taches noires en fin de journée, les enfants cédaient parfois à la moquerie de façon gentille.

Il y a des orages d’été qui passent et changent un peu les paysages immuables d’Arda. Morrigun n’avait jamais auparavant croisé des elfes. Un soir une elfe emmitouflée dans sa cape sortit son luth pour chanter et faire danser l’assistance. Cette Dame Shalalaa, provoqua une sorte de panique ou de désespoir profond dans le coeur et l’esprit de la dunaelle. Sans doute ne fut ce pas l’effet escompté par Dame Shalalaa, car Dun Daim ne comprit pas cette inquiétude soudaine chez Morrigun. Les chants avaient sans doute remonté des peurs et des sentiments enfouis et cachés à la vue de tous. Sans doute les chants avaient ils décuplés les peurs? Il fallut énormement de patience et de compréhension de la part de Maerendor pour juguler le flot de crainte de la dunaelle.

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 Songe Morrigun le Ven 14 Sep - 17:13

Morrigun flânait sur l’herbe grillée du jardinet de la duvodiad, allongée au milieu des totems de bois des clans du Dunland. Les moutons blancs trottaient à travers le ciel augurant des pluies a venir. De sa main elle essayait d'arrêter et de rassembler les nuages comme elle le faisait jadis avec ses moutons dans les alpages des Montagnes Blanches. Désespérément les moutons du firmament restaient réfractaires a toute forme de discipline, mais Morrigun n’avait jamais eut la prétention de commander aux cieux. Par flash, les images de son idylle avec Dun Daim lui traversait l’esprit a chaque rayon qui se reflétait sur l’anneau qu’elle portait toujours a son doigt. Morrigun se demandait parfois si toutes les femmes du monde vivait l’amour ainsi. La duvodiad par exemple, avait elle un anneau au doigt quand elle est morte? Avait elle dans le coeur, ce petit rien qui vous porte malgré le tumulte au dehors?

A cette époque de l’année les petits baegail redescendaient des alpages avec les troupeaux chassés par les premières pluies et frimas de l’automne. Ils rejoignaient les villages provisoires des camps d’été pour la migration vers les villages au pieds des montagnes qui offriraient aux Daen de meilleures conditions de vies pour l’hivers. Ces retrouvailles étaient l’occasion de grands rassemblements et de marchés d’échanges pour les Daen, les couples s’y officialisaient et les conflits parfois éclataient. C’était aussi l’occasion pour certains de revendiquer la place du Brenin et les combats rituels avaient alors lieu. Les bières nouvelles et l’hydromel coulaient a flot lors des fêtes de nuit et l’on dansaient souvent à en perdre haleine...

Une bonne partie de l’après-midi fut passée ainsi a rêvasser allongée pour Morrigun. En se promenant pour faire le plein de fruits frais pour les enfants elle tomba sur des vieux mannequins de montage d’armurerie. Elle se rappela alors son ‘Chef d’oeuvre’, qui n’attendait que la touche finale. La broigne, Morrigun l’avait ramené de son premier voyage du Dunland. Le Brenin s’était moqué d’elle en lui disant de l’offrir a son futur époux. Mais s’était il réellement moqué d’elle? Peut être le Derudh avait eut une vision sur Morrigun. Morrigun repensa a ses derniers rêves et ceux de Maerendor. Ils faisaient le même, et celui-ci avait quelque chose d'effrayant pour Morrigun: le combat. Etait ce une métaphore ou mettre l’amphore comme Morrigun le disait, n’ayant pas compris ce mot? 
Le combat! Morrigun n’avait jamais porté la main sur un homme, les armes à la main. Sauf une fois et ce souvenir provoquait en elle une boule d’angoisse et de dégout. D’ailleurs, la masse qui avait oeuvré au trépas de l’homme restait dans le coffre ou Kilhourz, l’arme de Nade restaurée par Engelwyne attendait patiemment l’âge de raison de Dievlig. Morrigun se souvenait de cet épisode douloureux, de sa peur, de son dégout et de l’absurdité de la guerre qui liguait les Hommes les uns contre les autres:

Ce jour là elle avait dressé le campement pour les enfants et elle, comme a son habitude. Il restait tout au plus une a deux journées de cheval pour rejoindre le campement d’été du clan à flanc de montagne. Dans la journée Morrigun avait remarqué les traces de passage de cavaliers, sans doute des rohirrim et celle d’orques ou d’ourouks. Morrigun s’était bien dispensée de les suivre et d’en savoir plus. Sa seule préoccupation était de ramener les enfants dans le clan sains et saufs. Elle n’avait pas fait de feux, avait trouvé le couvert d’un bosquet ou les chevaux étaient cachés de la vue d’éventuels visiteurs et avait demandé aux enfants d’être calme et silencieux. Dievlig et Cyrion jouaient avec leurs animaux de bois dans le calme, Dievlig étant plus intéressé par la multitude de petites bêtes vivantes qui paradaient sur le sol. Morrigun surveillait les bêtes, elle avait déposé sa cape et ses armes près des selles qui les abriteraient du vent et du froid de la nuit. Plusieurs fois elle avait aperçu des nuages de poussière au loin mais ils s’éloignaient ou restaient à bonne distance. Ses longs cheveux couleur d'ébène encadraient son visage tanné par le soleil, les mèches folles dansaient sur son front et lui chatouillaient les lèvres.

“Awel un stopio i ogleisio mi”

Morrigun esquissait un petit sourire a chaque chatouille de ses cheveux. Parmi les bruissement de feuille elle perçu bientôt un pas sourd et lourd qui se rapprochait. Instinctivement la dunaelle plissa les yeux et balaya du regard les alentours. La silhouette d’un cavalier se détachait a une bonne centaine de mètre; le vent avait dissipé la vigilance de Morrigun et le cavalier lui avait échappé. La silhouette massive indiquait qu’il n’était pas Dunlending, ses frères préféraient le cuir ou les mailles légères, son cheval avec un caparaçon le confirmait aussi. Un forgoil, sans doute un éclaireur ou un messager.
Morrigun se ramassa sur elle même et se dirigea vers les enfants en ne quittant pas des yeux la direction du cavalier. Le chant des oiseaux se tu et un long silence plana tout juste perturbé par le bruissement des feuilles et le pas du cavalier. Sa respiration se faisait de plus en plus forte, la peur la prenait. Morrigun n’avait jamais eut a se battre contre un homme ou une femme. Chasser un loup, l'abattre ou même un gobelin n’était pas du tout pareil pour la dunaelle et elle n’avait même jamais tué un gobelin. Elle arriva près des enfant quand le cavalier percevant la dunaelle leva sa lance vers elle pour charger. Sa position recroquevillée avait du faire craindre a l’homme une embuscade ou quelque chose de la sorte; sans doute avait il vu aussi les trois chevaux et voulait il profiter de son avantage? Le cavalier chargea Morrigun fonçant a travers les branchages du bosquet. La dunaelle prit la première chose qui lui tomba sous la main, une des selles. Morrigun tourna sur elle même en attrapant la selle et la balança sur la lance du cavalier. Il y a parfois des miracles qui se produisent et celui-ci en fut un. Le cavalier Rohir fut surpris par la manoeuvre et n’ayant pas assuré son emprise sur la hampe de la lance celle-ci piqua du nez sous le poids de la selle et se ficha dans le sol. La lance gicla de la main du cavalier faisant dévier sa main, sa monture fit alors une embardée percutant Morrigun qui en fut légèrement sonné. Celui-ci poussa un juron et retourna sa monture en dégainant son épée. 
Morrigun chancelait sur ses pieds en cherchant la direction du cavalier. 

“Faur chwaer, u beiciur!”

Les sons résonnaient dans sa tête, déformés mais orientés.

Le cavalier en entendant les cris, donna des coups de talons pour se diriger vers les enfants en rengainant son épée. Morrigun ne le vit pas remettre au fourreau son arme et dans un dernier effort pour protéger les enfants se précipita sur le cavalier dans l’espoir de le faire tomber de sa selle. Elle sauta a la taille de celui-ci portant tout son poids vers l’avant sans juger de la chute. Le cavalier glissa de sa selle avec Morrigun a sa suite. Les corps s’échouèrent lourdement sur le sol. La tête du cavalier heurta la masse dans un craquement sinistre et Morrigun s’étala à ses cotés, inconsciente...

“Faur chwaer!” 

Dievlig et Cyrion remontait la petite sente qui menait à la maison de la duvodiad, leur mère. Morrigun émergea brusquement de son songe et regarda les enfants courant vers elle.

“Tu sais que bientôt ça sera le brame du cerf? Lança Cyrion.

On pourra aller les voir et les entendre, Morri?” ajouta Dievlig.

Dievlig et Cyrion progressaient dans le langage a une vitesse effarante, laissant sur place Morrigun malgré ses efforts.

“Ie, nous irons entendre les cerfs appeler les biches et... essayer de les voir”

Cyrion porta son regard sur le mannequin que Morrigun avait ramené devant la maison.

“Que fais tu avec ce mannequin?”

Morrigun sourit, amusé par la curiosité insatiable des deux enfants.

“Je vais terminer ma broigne pour fu nghariad, il me reste à lui donner une âme”

Les enfants acquiescèrent en gloussant et emboitèrent le pas de Morrigun rentrant le mannequin dans la maison. La survenue des enfants avait coupé net son travail de mémoire, mais il ne serait sans doute pas un moment ou elle ne songerai, à nouveau, à ce triste épisode.
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 Die Alone?! Morrigun le Lun 15 Oct - 12:57


Morrigun ouvrit les yeux. 
Elle était allongée sur le sol, son épaule et sa hanche droite lui faisaient mal. 
Elle entendait une conversation, deux enfants dont elle reconnaissait parfaitement la voix maintenant.
Il y avait aussi un homme qui semblait parler avec difficulté.

“Qui est elle?”

“C’est notre grande soeur, elle vit avec nous le temps que mam revienne”

“Que faites...” L’homme cracha un peu de sang et poursuivit “... vous, ici?”

“On va au village voir le brenin!” Cyrion s’agitait comme si la réponse fut évidente.

Morrigun sentait ses bras et ses jambes, mais sa tête lui semblait si lourde. Elle balaya du regard les environs et aperçu le cheval du cavalier dont les sabots claquaient sur l’affleurement rocheux des terres ancestrales Dun, maintenant occupées par les forgoils.

“Par Helm!... Que faites vous... dans une zone... de guerre?” L’homme en s'énervant faisait remonter des glaires et du sang en sa bouche, qu’il crachait péniblement”

Morrigun s’arracha de sa position sur le dos pour se glisser sur le coté afin de se relever en laissant échapper un cri de douleur. Elle aperçu alors le forgoil allongé et les deux enfants debout et méfiants à coté de lui. L’homme était à l’endroit ou Morrigun l’avait culbuté de son cheval; elle, pour sa part, avait du rouler dans les buissons, renvoyée par la terre meuble.

Les cheveux de l’homme étaient blonds comme ceux de Cyrion, il portait l’habit vert des Hommes du Rohan, une maille et un casque reprenant la thématique équestre. Rien d’original, les guerriers dunlending adoptaient des tenues bien moins codifiées. L’homme avait les yeux azur, et sa peau tannée par le soleil témoignait de longues heures à chevaucher à travers les plaines. L’homme devait avoir la colonne vertébrale brisée et ses long cheveux de paille baignait dans le sang qui perlait de l’arrière de son crâne.

Morrigun s’appuya sur le sol pour se relever, la douleur irradiait dans tout le coté droit. Elle réussit a se mettre en tailleur et regarda l’homme et les deux enfants.

“Duhirun, toi menacer enfants! Toi avoir ce que tu mérites!” Morrigun massacrait le westron comme a son habitude. Morrigun n’est pas une mauvaise femme, mais son rôle de nourrice lui tient a coeur, et les armes levée près d’enfants l’avait fait sortir de sa nonchalance dunaelle.

Le cavalier tourna les yeux vers Morrigun. “Je suis mort... Et toi... Femme, tu me railles encore!” L’homme laissa échapper encore un peu plus de sang.

“Corniog, lui toi punir pour vouloir porter coup épée a enfants! Toi être mauvais homme pour vouloir tuer enfants et les manger. Forgoils pas aimer Daen, vous voler terres a nous et nous chasser!”

L’homme savait pertinemment que Morrigun avait du être élevée en ce sens et qu’il était inutile de continuer cette conversation. Elle ne changerai pas d’avis, comme lui d’ailleurs: l’ignorance et la haine de l’autre était dans leurs coeurs.


“Femme fait moi une faveur... quand je serai mort. Attache moi à mon cheval et... renvoie le, vers les miens.”

Morrigun regarda l’homme et se glissa sur ses jambes avec difficulté. 

“Ouargues tuer ta cheval et manger ta viande, si moi faire ça. Moi vaincre ennemi forgoil, moi faire a toi honneur des guerriers vaincus par Daen! 
Moi prendre ta tête et laisser corps dans cairn. 
Ta lance fera pierre levée comme pour daen. Ta cheval être libre, moi pas être voleur comme forgoil”

“Tu vas pas me tuer... devant les enfants?”

“Partout ou enfants aller, Hommes montre guerre et sang! 
Je pas te tuer devant eux, mais eux savoir que toi être déjà mort.
Si toi vouloir, moi pouvoir raccourcir douleur pour toi.”

Morrigun sera sa main sur le pommeau du couteau de chasse. Morrigun se tourna vers les enfants

“Du i'n iaun, fu bach;

Maer forgoil unaeth ur hun u maen hau.” (Je vais bien, les enfants. Le forgoil n'a que ce qu'il a semé.)

Morrigun, attacha le cheval du rohir avec les leurs en prenant son temps. Le choc sur le sol l’avait sonné et son corps était endolori. Elle dessella la bête, il était évident que le cavalier ne repartirait pas a cheval. Elle remarqua quelques tiges de plantes ayant un effet analgésique, et en ramassa quelques brins.

Elle regarda a nouveau le rohirrim; qui ne semblait pas vouloir qu’on abrège son agonie. De son pilon, enfermé dans sa gibecière elle écrasa les tiges et les dilua dans un peu d’eau fraiche contenu dans une outre. Elle s’approcha du rohirrim, et se proposa de lui verser le contenu dans la bouche. Le rohir la fixa un instant et lui demanda:

“Tu me tues, et maintenant essaies de ... me soulager? Ou est ce encore... Une ruse des tiens?”

Morrigun ne savait que penser de l’attitude du rohir. Toute sa connaissance de ce peuple se résumait aux récits du Derudh et des mises en garde du Brenin. Son frère, lui pensait qu’ils étaient autant inoffensif à pieds que redoutable sur un cheval. En fait il plaisantait toujours en disant que pour apprécier la puissance d’un cavalier rohir, il fallait jeter un oeil à la dentition de son cheval! Morrigun toisa le rohir; ce qui fut facile pour une fois.

“Stupide forgoil! Moi essayer de soulager ta peine!” Morrigun cracha sur le sol à coté du rohir et s'apprêta a verser le contenu du pilon sur le sol.

“Arrête! Je vais.... Le prendre”

Les mots sortaient avec de plus en plus de difficulté de la bouche du rohir. Ses yeux d’azur devenaient de plus en plus vitreux au fur et a mesure que la vie l’abandonnait.

Morrigun, malgré son aversion pour ce peuple avait une boule d’amertume dans la gorge a voir un homme mourir de ses mains. Même si un rohir avait tué son premier époux, elle n’avait pas suffisamment de rancoeur pour se réjouir de la mort de cet homme.

“Femme! Promets moi.. De me renvoyer... Vers les miens!”

Morrigun se pencha sur le Rohir et posa sa main sur son front. 

“Toi être guerrier! Toi avoir honneur que nous donner a ennemis morts. Toi être chanté par Daen dans veillée”

Le Rohir susurra quelques mots à l’oreille de Morrigun et rendit son dernier souffle.

“Je ne... Voulais... Pas les tuer,... Je rangeais... Mon épée au fourreau.”

Dans son dernier souffle, il lui donna son nom. Morrigun lui ferma les yeux, et posa sa main sur la garde de son couteau de chasse. 

Elle ôta le casque du rohir et le posa a coté d’elle. De grosses gouttes de sueur perlaient de son front quand elle pointa la lame le long de la tachée de l’homme. Elle jeta un oeil vers les enfants qui jouaient derrière le bosquet près des chevaux et plongea sa lame dans le cou du Rohir. La lame glissa le long de la trachée et coulissa sur la processus transverse, puis elle fit gicler la lame vers l'extérieur pour sectionner les muscles du cou. Elle reproduisit le même mouvement au coté opposé et finit pas sectionner la trachée et désolidarisa la tête du tronc par un coup sec de sa lame entre deux vertèbres. Morrigun avait une grande habitude de ces gestes sur les moutons, mais cette fois ce fut un homme. Elle glissa vite fait la tête du rohir dans un pan déchiré de son haubert au couleur du Rohan et noua le tout pour que la tête ne fut pas visible des enfants. Puis elle accrocha le “trophée” sur une branche des arbustes qui poussaient dans le bosquet. 
Morrigun dispersa un peu de terre sur le tronc décapité du rohir et commença a le recouvrir de terre et de gros cailloux, afin que les prédateurs ne puissent le sentir et le déterrer. Elle enficha la lance du rohir dans le sol à l’endroit de la tête.

Quand elle eut fini sa macabre besogne, elle posa une main sur le tronc noueux d’un arbuste et expulsa son dégout sur le sol en un agglomérat nauséeux.

“Corniog, dudu i dim un rhufelur.

Pam?” (Corniog, je ne suis pas une guerrière. Pourquoi?)

Morrigun saliva et cracha pour expulser la salive acide qui dérangeait ses narines.

Morrigun lava ses mains et vérifia que les enfants allaient bien. Elle scruta les alentours du bosquet et n'aperçut pas âme qui vive. Elle sortit son poinçon et donna un coup violent avec une petite masse sur le casque du rohir de manière a ce qu’il soit bien visible puis elle le plaça sur la pointe de la lance. Le vent ballottait le casque émettant un petit tintement. Elle sourit et en leva le casque, se gardant de le remettre avant leur départ.

“Mae hun un forgoil, bud eich un chi un fuan dod o hud ich garned.
Ac mae fu arwud, budant un gubod a daeth â chi i meun ir daear!”
(Voilà forgoil, les tiens ne tarderont pas retrouver ton cairn.
Et par mon signe, ils sauront qui t'a porté en terre!)

Morrigun prépara un petit feu de bois sec en bénéficiant du couvert du bosquet et prépara le repas du soir. Elle coucha ensuite les enfants et s’endormit profondément hanté par le visage du forgoil.

Le lendemain elle sella le cheval du rohir et le lança au galop vers les siens en lui donnant une claque sur la croupe. Puis avant de repartir elle glissa le cimier du rohir sur la pointe de la lance qui se remit a tinter dans le vent.

Morrigun émergea de son songe en entendant le chant d’un merle. La matinée devait bien être avancée car le soleil avait réchauffé la pièce. Sur son épaule nue elle sentait la brise douce des matinées d’automne. Ses grands yeux se levèrent vers l’homme en face d’elle: son époux. Le dunedain la regardait se réveiller lentement; naturellement comme s’ils ne faisaient plus qu’un depuis des décennies, elle se glissa dans le lit pour se réfugier contre lui. De son index elle glissa de la pommette vers les lèvres de Maerendor et le temps s’arrêta de nouveau...

NDLR: Je tiens à preciser que le Rohir mort, dans ce passage est purement fictif. Aucun personnage du peuple des chevaux n'a été martyrisé ni blessé durant la rédaction de ce court passage.  
Comme vous l'aurez compris, le but est d'ouvrir le RP de Morrigun et Maerendor pour leur passage dans le Rohan par ce lien fâcheux de Morri avec un homme du rohan. Je n'ai pas cité volontairement le nom du rohir tué, afin de faciliter la chose.
Donc libre à vous de créer un pont entre les RP ou pas... 
Vu l'amitié virile qui règne entre ces deux peuples, cet épisode ne me semble pas idiot; si c'est le cas merci de me le préciser.  
Le temps de Morrigun et Maerendor sur Bree touche à sa fin, il est temps pour le dunedain de répondre à l'appel de ces frères et pour Morrigun de veiller sur son époux.

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Je connais la route  Morrigun le Mar 15 Jan - 18:04

L’instinct avait ramené Morrigun dans son village. Les enfants de la duvodiad y avaient fait leurs marques et les petits daen les avaient vite adopté malgré leurs différences. Peut être le fait qu’ils se débrouillaient correctement en dunael les avaient ils aidés.

Ianu et Fedul avaient accueilli leur fille comme il se doit et sa petite hutte avait été entretenue durant son absence. 

Quand Morrigun était entrée au village avec les deux enfants, nombre de guerriers remarquèrent le petit balluchon de toile verte qui pendait au pommeau de sa selle. Ce fut d’ailleurs un étonnement parmi les siens. 
Le Brenin fut le premier à lever l’étoffe du trophée, son visage fut à la fois prit d’un sourire et d’un air grave. Le Derudh ôta le trophée du pommeau et quelque peu désappointé prit la direction de sa halle. Le Brenin lui emboita le pas en faisant signe à Morrigun de les suivre. La vie continuait au village, quoi qu’il en coute malgré le tribu en guerrier que le fourbe Magicien Blanc avait demandé. Le Brenin en paierai certainement le prix, un jour...

Morrigun emboita le pas des deux seules autorités qu’elle reconnaissait en ce monde en dehors des Dieux. Le Brenin et de le Derudh n’avaient sans doute pas imaginé qu’en envoyant Morrigun à Bree, elle serai revenue avec ce genre de paquet sous le bras. 

Sut mae hun un digud, dunes?“ (Comment cela est il arrivé, dunes?)

Le Derudh lança la première salve, glissant la culpabilité dans le coeur de Morrigun. Elle vivait déjà avec cette culpabilité depuis cette mort accidentelle, mais le Derudh ne fit que la raviver.

Le Brenin lança a son tour la deuxième salve en apprenant qu’elle avait laissé son poinçon sur le casque du cairn défiler en grande hâte pour le forgoil. Le Brenin gesticula en tout sens, en faisant défiler le panthéon dunael dans ses imprécations et remontrances. 
Morrigun s'effaça, sans doute aurait il mieux valu qu’elle reste allongée pour toujours sur le sol de ce petit bosquet... Que seraient devenus les enfants de la duvodiad? Qu’importe, elle avait agit, réagit dans l’urgence.

“Un Suml!” lança Morrigun. (ça suffit)

La halle se fit silencieuse... Le Brenin et le Derudh dévisagèrent la dunes de pieds en cape.

“Gwerc’h D...” Rétorqua le Derudh

“UM SUML!” Morrigun le coupa net.

Elle arracha des mains le petit balluchon des mains du Derudh. Jamais de mémoire de Daen aucune femme n’avait coupé la parole a un Derudh.

“DUNES U TURCH-LUTH!” Le Derudh tenta de la remettre à sa place. Le vieux sage lui serra le poignet de sa main crevassée.

“Peidiuch ag anghofio eich le uma!” (N'oublies pas ta place ici!)

“Unes i ar gyfer gwell, Derudh. Budai paub wedi gwneud ur un peth i mi.
“ (J'ai fait pour le mieux, Derudh. Tout le monde aurait fait pareil à ma place.) 
Le Derudh relâcha son emprise lentement, laissant une marque sur le poignet de Morrigun. 
Morrigun tendit le trophée au Derudh mais celui-ci refusa de le prendre.

“Mae'n uw eich baich, nid fu ngeiriau, na'r clan. Os oes forgoils gael uchudig o gud-ubodaeth: maent un deal. Fel arall, buduch un cael haul fel rhan o'ch gurthdaro. (C'est ton fardeau, pas le mien, ni celui du clan. Si les forgoils ont un peu d'intelligence: ils comprendront. Sinon tu auras droit toi aussi à ta part de conflit.)

Tu devrais aller voir Carannog, il tourne en rond depuis ton départ... Le Derudh esquissa un sourire contrastant avec le grommellement du Brenin.

“Tu vas repartir sur Bree, Morrigun. Je ne veux pas plus d’ennui dans le clan avec cette tête de paille!” Le Brenin désigna le trophée. Quand a Carannog... Grmph! 

...

Le temps de Morrigun et Maerendor avait pris fin sur Bree, et l’appel du futur Roi les avaient conduit a nouveau vers le sud.
Morrigun stoppa Gwunavel sur l’aplomb rocheux au dessus du village. Un large sourire illumina son visage en voyant le village natal. A l’approche de l’hiver et de ses rigueurs, le clan avait déménagé vers la vallée dans une zone marécageuse et poissonneuse. La tourbière leur fournirait de quoi se chauffer et se nourrir durant les mois d’hiver. Elle agita les bras vers Dun Daim pour lui demander de presser le pas. 
Le voyage depuis Bree n’avait pas été des plus reposant, elle avait suivit la route de son époux évitant Tharbad. Il avait voulu éviter l’Enedwaith en piquant à travers les cols des Monts Brumeux, mais cela leur avait valu une bonne gelée. Il lui avait fait découvrir Imladris et l’Eregion parsemée de ruines elfiques et d’allgraig dunlending. Moins sur la défensive, Morrigun avait acquis avec son époux une certaine habileté au maniement de l’épée et parfait ses talents équestres.
Morrigun noua autour de la taille de Maerendor une écharpe de laine aux couleurs du clan du sanglier.

“Mae'n brud, un mund i laur i'r pentref gennuf gufluno.” 
(Il est temps, descendons au village que je te présente.) 

Morrigun piqua les flancs de Gwunavel et fila au petit trot jusqu’a l’entré du village. Brouillamini de questions, grandes accolades, moult bolées d’hydromel et regards méfiants tombèrent sur les épaules de Maerendor et Morrigun, mais dans les yeux de Fedul et Ianu brillaient l’espoir de voir leur fille enfin porter un enfant et mener la vie de toute bonne dunes.

Hélas, au petit matin Morrigun avait disparu, laissant Maerendor seul sur la couche de sa petite maisonnette.


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